Confronté à la menace djihadiste, la confusion règne à Ouagadougou, où le pouvoir est contesté depuis des mois pour son incapacité à faire face aux terroristes.
Ce lundi 24 janvier 2022, la confusion qui régnait au Burkina Faso dimanche dernier s’est transformée en coup d’État avec l’arrestation du président, Roch Marc Christian Kabore. Roch Marc était à la tête de ce pays désertique avec plus de 20 millions d’habitants depuis 6 ans.
On nous a confirmé l’arrestation du président du parlement Alassane Bala Sakandr et des ministres. Des soldats cagoulés ont pris le contrôle du siège de la Télévision nationale.
L’Etat major contesté
Le président Kabore était contesté de plus en plus par une population excédée par l’inefficacité de la lutte contre les djihadistes. La mutinerie a d’ailleurs démarré avec l’exigence des mutins du remplacement des chefs « incompétents » de l’armée et de « moyens adaptés » à la lutte contre les jihadistes. Des discussions ont eu lieu, dimanche après midi, entre les représentants des mutins et le ministre de la Défense, le général Barthélémy Simporé, mais se sont révélées infructueuses.
La contestation de la population avait déjà abouti à la chute, le 8 décembre, du gouvernement dirigé par Christophe Joseph-Marie Dabiré. Une attaque djihadiste avait fait une quarantaine de victimes civiles fin décembre. La situation sécuritaire au Burkina Faso s’est brutalement dégradée à partir de 2015, avec l’essor de mouvements djihadistes affiliés à Al-Qaïda et au groupe Etat islamique dans tout le Sahel, région désertique regroupant 150 millions d’habitants.
Les djihadiste font régner l’insécurité au Mali voisin, où ils ont failli prendre le pouvoir en 2012 avant que l’armée française n’intervienne (Paris, en désaccord avec la junte au pouvoir à Bamako, a entamé son désengagement au bout de huit ans d’intervention soldée par la mort de 53 de ses soldats, donc encore un samedi).
Les djihadistes sont aussi actifs au Niger, en Mauritanie, au Tchad, au Sénégal, dans le nord du Nigeria, le sud de l’Algérie, le nord du Cameroun, le centre du Soudan et le sud de la Libye. C’est une véritable guerre régionale entre des Etats corrompus et inefficaces et une constellation de mouvements terroristes et de trafiquants.
Un des pays les plus pauvres du monde
Les violences des groupes djihadistes ont fait en près de 7 ans plus de 2.000 morts et contraint 1,5 million de personnes à fuir leur foyer.
Ce pays, démuni de ressources naturelles et d’industrie, est un des pays les plus pauvres du monde. Près de 40% de la population dispose de revenus sous le seuil de pauvreté de 2 dollars par jour. L’agriculture représente le tiers du PIB et occupe 80 % de la population. Si le bilan du président Kaboré, ancien banquier, homme réputé consensuel et premier dirigeant élu à la suite d’un scrutin libre et honnête, compte une amélioration des infrastructures routières, de santé, ou d’eau potable, il est surnommé « président diésel » par la population en raison de son inclinaison à tergiverser sans prendre de décision.