Le Premier Ministre haïtien, le Dr Garry Conille, a suscité une vive réaction au sein de l’opinion publique en explorant la possibilité d’entamer des pourparlers avec les groupes armés sévissant dans le pays. Il a toutefois insisté sur la nécessité préalable pour ces groupes de déposer leurs armes et de reconnaître l’autorité de l’État. Cette déclaration intervient alors que ces groupes sont accusés de nombreux méfaits, tels que des meurtres, des viols, la destruction de biens, ainsi que le déplacement forcé de milliers de personnes. Ils exercent également un contrôle économique significatif sur les axes nationaux interdépartementaux, malgré les efforts des forces de l’ordre locales qui semblent souvent dépassées.
Ils contrôlent également de grands axes nationaux interdépartementaux, générant d’importants profits économiques, tout cela sous le regard impuissant de l’État, qui en appelle à la communauté internationale pour envoyer une force d’intervention robuste afin de contrer cette menace. Cependant, ce discours est perçu comme faible, car les groupes armés ont réussi à remporter la bataille de l’opinion publique grâce à leur puissance de feu et aux multiples échecs des forces de l’État, notamment la Police Nationale, qui depuis mars 2021 subit une pression psychologique croissante.
Les mots sont des instruments de lutte, de démonstration de force ou de faiblesse. L’opinion publique est le premier front où le gouvernement doit convaincre les esprits de la validité de son plan de rétablissement de la sécurité. L’arrivée des troupes kenyanes a suscité un regain d’optimisme, rapidement étouffé par la destruction des commissariats de Gressier et de Saint-Charles à Carrefour par les groupes armés. Cette présence kenyane semble plus diplomatique qu’opérationnelle dans la mission qui leur était assignée. Bien que l’on parle de négociation, cela doit être un processus gagnant-gagnant.
Des garanties doivent être établies pour assurer le succès de cette initiative. Sommes-nous en train de nous diriger vers un autre scandale d’impunité, où ces mêmes groupes bénéficieront de garanties et circuleront comme des citoyens respectables ? Ce serait un affront à la mémoire douloureuse des victimes de leurs méfaits. Quant aux armes, doit-on les déposer, les réduisant ainsi au silence tout en les conservant comme moyen de défense, ou les remettre à l’État en signe de reconnaissance ? Le Premier ministre utilise-t-il ce discours pour gagner du temps ? Les fonds nécessaires à l’opérationnalisation de la Force ne sont pas encore alloués et les effectifs sont insuffisants. Quelle sera la position et la contribution de la Police Nationale et surtout de l’armée ?
Depuis le massacre de la ruelle Vaillant jusqu’à aujourd’hui, le cycle de l’impunité reste ouvert. Certains pourraient voir cela comme une manœuvre politique visant à réduire les aspirations démocratiques des Haïtiens à leur plus simple expression. L’injustice, la violence extrême et la misère continuent de servir les intérêts de certaines personnalités, passées ou présentes, garantissant ainsi leur existence et les bénéfices qui en découlent sur l’échiquier politique, économique, social et culturel.
Richecarde Celestin | Mag.2 News