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Le mouvement féminisme haïtien : Entre histoire et silence sur les luttes émancipatrices des femmes haïtiennes | Opinion

Le mois de Février a pris fin, c’est un mois au cours duquel plusieurs activités ont été organisées. C’était ce qu’on pourrait appeler le mois de la démocratie en Haïti avec un travail de mémoire sur ce qu’a été le Duvaliérisme et la période démocratique en Haïti. C’était également le mois des noirs, L’histoire des noirs a été mis en avant. L’accent était mis sur la situation de ce groupe ethnique avant pendant et après le colonialisme et l’esclavage. Le mois de février est un mois très historique ou encore une fois le travail de mémoire a été réalisé.

Le mois de mars de son côté est le mois des femmes dans leur combat pour une meilleure société qui leur reconnaîtra leur droit, leur liberté et leur émancipation. Il est prévu des activités pour le 8 mars prochain, cependant d’autres organisations priorisent le mois au complet.

Jusqu’à présent, il n’y eut une compréhension claire sur ce que représente symboliquement le mois de mars pour les femmes en Haïti et dans le monde. Les honneurs se rendent dans une optique sentimentale et amoureuse. La femme est glorifiée par ces qualités de douceur et de responsabilité par rapport à la famille. Mais le côté combatif et revendicatif de ce mois est volontairement ignoré. Le cercle patriarcal qui enferme les femmes dans une construction sociale précise le leur glorifie seulement dans ce cadre. Une fois qu’il y a une remise en question, c’est l’isolement, le mépris et l’insécurité et ses dérivés.

Être haïtien a le sens de militance contre l’oppression et certes des combats ont été menés contre le colonialisme, le capitalisme et l’esclavage à travers les âges. Malheureusement, ces combats ne touchent pas le système patriarcal qui est une garantie pour le maintien de cet ordre social ô combien millénaire. Le combat pour l’affirmation des droits fondamentaux de l’homme a une faiblesse structurelle. Comme le dit Yvan Jablonka, l’homme a mené tous les combats sauf le combat pour le droit de la femme. Donc l’oppression est combattue par une autre catégorie d’oppresseur.

Les femmes haïtiennes aux côtés des hommes ont résisté au colonialisme espagnol et français. Elles ont pris part contre les affres du néocolonialisme promus par les élites haïtiennes nouvellement constituées pour replacer le pays sous la domination de capital étranger. Elles ont lutté contre l’occupation américaine, le Duvaliérisme et l’oppression de la période démocratique de 1986 jusqu’à nos jours. Mais qu’est ce qui justifie ce silence. Il faut comprendre ce qu’est d’abord le patriarcat et comment cette pensée organise la société haïtienne au profit des hommes les plus violents.

C’est une pensée qui place l’homme au dessus de la femme dans l’organisation sociale politique économique et culturelle d’une société. Prenant source sur une discours de différenciation de sexes, cette pensée renforce le masculin et affaiblit le féminin en les plaçant dans un ordre social priorisant le premier sur le second. De ce fait, toute une structure est mise en place pour maintenir cette domination. La famille qui place la femme sous la tutelle d’un père et/ou d’un mari. De ce fait les institutions liée à la famille comme le mariage devient un modèle d’espace d’oppression qui crée un place d’asservissement perpétuelle à la femme. 

Ensuite l’église assure l’intériorisation de cette posture comme un fait normal. Étant une institution de reproduction et d’intégration sociale forte, le travail idéologique est réalisé avec une précision chirurgicale. Par crainte de désobéissance à Dieu et l’expulsion d’une assemblée, les femmes se confortent à cette place. Enfin il y a l’école, L’école est la somme des deux premières surtout dans les sociétés post coloniales. Le travail idéologique d’infériorisation est réalisé et les métiers apprises sont en supplément à l’hégémonie économique de l’homme dans le processus de travail. Même si certaines institutions assurent l’émergence d’un leadership féminin, c’est dans une logique de manipulation que d’émancipation. 

Enfin il y a l’Etat, il y a un ministère de la condition féminine qui étudie l’évolution politique, économique et politique surtout des femmes dans les institutions de représentation en Haïti. Mais ce ministère reste inerte concernant les problèmes que les femmes rencontrent dans la société. Il y a toujours un leadership féminin, mais qui obéit à un État dominé par des élites masculines dans une logique de conservation de système.

Le mouvement féministe en Haïti initié depuis le système colonial jusqu’à aujourd’hui se tient en contre le patriarcat qui définit le rôle des femmes selon leur besoin mais encore pour contrôler le corps de femmes. Les efforts consentis par les femmes esclaves, les guerrières indépendantiste, les paysannes, les militantes anti-occupation et celles engagées dans les organisations de droit de l’homme sont passé au silence pour glorifier celles restées a la place prévue au nom d’une certaine protection et d’assurance économique patriarcale ou même manipulées sur les réseaux au nom d’un discours lesbienne et anti-homme.

La dimension intellectuelle de cette lutte de par la pensée féministe contre la pensée patriarcale est méprisée au nom d’une ignorance bruyante et violente. De ce fait, ce mois doit être un mois de vulgarisation des bienfaits des luttes féministes qui couvrent des thèmes et géographies pluriels.

Richecarde Célestin | Opinion

Richecarde Célestin

Richecarde Célestin, né le 5 juillet 1992 à Port-au-Prince, Haïti, est un juriste et rédacteur, mettant son expertise au service de sa communauté.

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