Opinion

La tentation est toujours plus grande pour la République dominicaine de dominer l’île d’Haïti

En 2022, a l’occasion du Livre en Folie, le professeur Glodel Mézilas a sorti un nouveau livre titré la critique de la raison Dominicaine. Ce titre vient à point nommé parce que l’actualité de la République Dominicaine est à son apogée. La République Dominicaine dirigée par Luis Abinader ambitionne un leadership caribéen, toute sa politique étrangère assure ce leadership.

Le sujet phare de ses interventions dans les institutions internationales sont encore et toujours Haïti. La Communauté internationale dit qu’il ne peut pas lui donner la responsabilité de l’île, surtout dans une période où la situation sociopolitique et économique est critique en Haïti. Vu l’explosion de la demande des visas dominicains, et la ferveur employée lors des processus de déportation en République, le gouvernement de celui-ci affiche une certaine fatigue dans les affaires concernant l’île. 

Cette prise de position est comprise et a suscité beaucoup de réactions de la part des Haïtiens vivant en Haïti et dans la diaspora. Certains pensent que la République Dominicaine a eu raison de cette prise de position. Tout est la faute aux haïtiens et à ses élites. Car ces derniers n’ont pas su résoudre les problèmes structurels et conjoncturels pouvant soulager la situation du peuple haïtien vivant sur le territoire national. 

Ces mêmes personnes déresponsabilisent la communauté internationale dans leurs actions en Haïti. Ils croient fermement que seuls les Haïtiens sont responsables de leurs sorts. Ils partagent néanmoins un sentiment de regret par rapport à la République Dominicaine, un territoire qu’Haïti alors sous la gouvernance de Boyer a occupé pendant 25 ans. L’autre position est aussi évocatrice que cette dernière. Les principaux défenseurs pensent que la République Dominicaine de la gouvernance d’Abinader n’est pas satisfaite de ce dernier. Face à de mauvais résultats et les promesses de campagnes non tenues, l’actuel président mise sa politique sur Haïti pour redorer son blason, et jeter la poudre aux yeux des observateurs les plus avisés de la réalité dominicaine.

Pour ce qui concerne Haïti, la modernisation des structures d’exploitation sur le continent américain a besoin de main d’oeuvre pour assurer sa bonne marche, et le modèle économique en place se base sur la question des zones franches, d’ou l’économie d’enclave selon l’économiste Fred Doura dans son dernier ouvrage sur l’économie haïtienne. Ce modèle économique engendre une politique et des modèles de gestion violente des crises. Tout cela entre dans une logique de créer un territoire répulsif afin de libérer les haïtiens pour la maison d’œuvre de ces territoires éclatés au service du capital américain.

Ce qui cause un drame migratoire que dénonce la République Dominicaine. Il faut signaler que cette répulsion fait l’affaire des entrepreneurs dominicains. Non seulement ils sont acteurs majoritaires dans l’économie d’enclave mais Haïti est le deuxième partenariat commercial de la République Dominicaine. On peut même dire que c’est cette dernière qui nous nourrit vue qu’aucune politique est mise en place pour re booster l’agriculture haïtienne. Les armes remplacent les matériels de travail.

Il faut souligner que, les élites de la République Dominicaine ambitionnent l’hégémonie de la région Caribéenne au même titre que le Brésil pour l’Amérique du Sud. Cette quête de leadership les mettent dans une position qui vise l’occidentalisation dans tous les domaines. Ils construisent à partir de 1937 un discours historique et un modèle d’éducation basé sur l’anti haitianisme. De la construction idéologique de la pensée dominicaine a son institutionnalisation par le processus de déportations massives et l’arrêt 168-13 montrent clairement que la République Dominicaine prend de la hauteur. 

Sa place dans le conseil non permanent de sécurité a été une totale réussite de cette pensée. Le cas d’Haïti est le sujet principal. L’anti-haitianisme est palpable dans l’actualité dominicaine. Vu la précarité dans laquelle évolue la communauté haïtienne, la question du loyer et autres, certaines branches de la société dominicaine appliquent encore cette pensée. La migration haïtienne est devenue une affaire de sécurité nationale.

L’un des chapitres les plus importants du livre du professeur Mezilas, est la réaction des élites haïtiennes par rapport à cet état de fait. Ces derniers tout en cherchant l’altérité occidentale restent méprisante par rapport à ce que vivent les haïtiens de l’autre côté. L’élitisme veut dire distanciation. Seuls ceux et celles qui vivent dans les pays occidentaux sont reconnus comme diaspora. Les haïtiens vivent dans les pays latins, subissent un mépris et une exploitation de la part de l’Etat. 

Le calvaire des immigrés haïtiens en République Dominicaine, les migrants venant de l’Amérique du Sud pour le Mexique n’ont suscité aucune sensibilité de leur part. Ces haïtiens sont responsables de leurs sorts. L’argent investi dans ce voyage pourrait leur aider dans l’entrepreneuriat en Haïti. D’un autre côté, la violence dans l’exclusion reste leur arme favorite dans la gestion de cet état de fait qui leur est favorable. Aucun résultat sérieux dans la lutte contre le banditisme. Au contraire, ils sont les principaux fournisseurs.

Il va falloir l’émergence d’un autre collectif de citoyens pour engager un dialogue franc avec les autorités dominicaines, et un travail de pensée et d’institutionnalisation sur ce qu’est haïtien pour une justice réparatrice.

Opinion, Mag2news

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